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La politique et la bourse : qui influence qui ?

July 2, 2024
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La politique et la bourse : qui influence qui ?

L’annonce du 9 juin faite par Emmanuel Macron sur les coups de 21h a eu un impact sur la bourse de façon rapide et brutale. Événement rare mais pas inédit, la dissolution a déjà eu des conséquences catastrophiques sur la bourse comme en 1981. On compare 1981 et 2024 pour vous.

On sait que vous connaissez ce mot par cœur et que vous aimeriez penser à autre chose mais la bourse est également concernée par cet événement politique alors on ne pouvait pas faire l’impasse sur le sujet.

Si vous lisez cet article dans 26 ans et que cela ne vous dit rien : le chef de l’État peut décider de mettre fin prématurément aux contrats de l’ensemble des députés élus précédemment. Tous les postes qui gravitent autour de cette fonction s’annulent également. De nouvelles élections nationales sont organisées et doivent se tenir dans les 20 à 40 jours qui suivent le dépôt du décret relatif à la dissolution. La campagne électorale pour ces législatives imprévues au calendrier est donc très courte.

Deux contextes politiques différents

Le 10 mai 1981, François Mitterrand du parti socialiste est élu à l’élection présidentielle. Annoncée lors de sa campagne, la dissolution était anticipée et programmée car elle allait se tenir “avant le 1er juillet”. Le 9 juin 2024, Emmanuel Macron du parti Renaissance situé au centre-droite, président en poste depuis 7 ans, prononce la dissolution de l’assemblée nationale seulement une heure après les résultats (temporaires) de l’élection européenne. La dissolution est une réponse directe aux résultats mettant largement en tête la liste du Rassemblement National, parti d’extrême droite.

François Mitterrand ne se voyait pas gouverner la France sans une majorité présidentielle à l’assemblée afin de mener à bien son programme. Emmanuel Macron a décidé de redonner l’opportunité aux français de s’exprimer et d’apporter de la “clarté dans les débats”. En 1981, l’issue pour le président était heureuse puisqu’il a obtenu sa majorité. En 2024, à l’heure de l’écriture de cet article, c'est un climat d’incertitude et de chronique politique qui anime le pays depuis plusieurs jours.

Des conséquences immédiates et importantes

La bourse a réagi en réalité à l’élection de François Mitterrand plus qu’à la dissolution. Fait très rare, la bourse a ouvert avec 30 minutes de retard. La dissolution ayant pour but d’intégrer la gauche au plus possible au sein du gouvernement, la réaction de la bourse peut y être reliée. Le contexte de la guerre froide explique cette panique sur les marchés envers cette “vague rouge”. La situation est devenue si importante que le franc a été durement impacté et a dû être sauvé par la Banque de France. Cela n’était pas arrivé depuis la crise de 68.

En 2024, l’incertitude du contexte politique et la possibilité d’une cohabitation avec l’extrême droite a fait trembler la bourse. Sur la première semaine post-annonce, le CAC40 a perdu 6%. La semaine suivante, le CAC s’est relevé tant bien que mal avec une hausse totale de 57 points. La place boursière française a perdu sa place de leader face à Londres et l’écart entre la France et l’Allemagne est monté jusqu'à plus de 80 points. La BCE, qui a annoncé une baisse des taux récemment, a déclaré ne pas intervenir avant la fin des élections pour l’économie française.

Ce que disent les études sur la relation entre la politique et la bourse :

Aux États-Unis, sur la période 1929-1980 ce sont les Démocrates qui permettent une économie plus fructueuse avec un écart de 9% selon une étude de Huang. En 2003, une étude réalisée par Santa-Clara et Valkanov sur la période 1927-1998 confirme cette hypothèse. Cette différence est encore plus importante sur les petites capitalisations.

En France, une étude réalisée par Gérard Charreaux porte sur la période mai 1981-août 2016. Elle commence à partir du mandat de François Mitterrand qui a agité la bourse cité précédemment et s’arrête avant la fin du mandat de François Hollande. Il semblerait que la gauche soit également plus favorable que la droite avec un écart annuel de 8,9% de croissance.

"L'économie a un impact sur les élections (...) mais les élections ont rarement un impact sur l'économie", affirme Jean-Marc Daniel.

Pas si sûr… 2024 est le théâtre de nombreuses élections à travers le monde. Toutes ont eu un impact au niveau national et international du côté de la bourse.

Au mexique, une femme socialiste à la tête du pays:

L’élection de Claudia Sheinbaum mais surtout de sa majorité au parlement a inquiété les investisseurs. Le peso a perdu 3% face au dollar américain et la bourse a chuté de 4%, soit sa pire séance depuis mars 2020, en plein covid. Les raisons des craintes des investisseurs : les promesses de campagne de la nouvelle présidente notamment sur les retraites et la sécurité sociale qu’elle pourra tenir grâce aux majorités au parlement ET au sénat.

En Inde, Narenda Moni obtient une majorité lors des législatives…et en fait non :

Les résultats provisoires ont été très bénéfiques pour la bourse indienne : les indices NES Nifty 50 et le Sensex ont atteint des pics absolus avec respectivement 3,6% et 3,75% de hausse. Sauf que les résultats définitifs annoncent une majorité relative, les marchés ont réagi durement. NES Nifty 50 a perdu 5,93% et le Sensex 5,74%. Cela montre à quel point les réactions de la bourse peuvent être vives et brutales.

Aux États-Unis, une élection prochaine suivie de près sur les marchés :

Il reste plusieurs mois de campagne présidentielle pour la première puissance mondiale mais une ré-élection de Donald Trump pourrait avoir un effet néfaste sur la bourse. De plus, les tensions géopolitiques qu’ilp ourrait provoquer auraient une incidence sur les bourses des pays concernés. Un dossier à suivre de près.

Qui de l'œuf ou de la poule ? Nous l’avons vu, la bourse réagit très rapidement aux annonces politiques qui changent le cours de la vie du pays. Les changements gauche/droite semblent avoir le plus d’impact sur les réactions des marchés. En France, le climat d’incertitude face à notre avenir politique amène à de la prudence et à attendre.

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